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Engrenages saison 8 (Canal+) : la fin d’une ère

Le pitch

Gilou s’est dénoncé à l’IGPN, il est incarcéré dans l’attente de son jugement. Profitant de la situation, Brémont, le commissaire de la Crim’, va lui demander d’infiltrer un gang de braqueurs, en échange d’une possible réintégration dans la police. De leur côté, Laure et Ali peinent à faire équipe et leur groupe est mis sur la touche. La mort d’un jeune migrant marocain va leur imposer de surmonter le trauma lié à l’incarcération de Gilou. Joséphine s’attache à Souleymane, un mineur isolé suspecté du meurtre, elle décide de le défendre. Le commissaire Beckriche va gérer les rapports avec Lucie Bourdieu, la jeune juge instruisant l’enquête sur l’homicide. Brillante mais peu expérimentée, elle se méfie des méthodes employées par les flics et traque la moindre entorse à la procédure.

  • Genre : Policier
  • Format : 10×52 minutes
  • Durée totale : 8 heures et 40 minutes
  • Si vous avez aimé : The Wire, Braquo, The Shield

La critique

Canal+ offre le 1er épisode de cette dernière saison, accessible à cette adresse pour les non abonnés.

Une 8ème et dernière saison après 15 ans de bons et loyaux services : Engrenages touche à sa fin sur Canal+. Donner une conclusion à une telle série est forcément un défi de taille pour ses scénaristes, qui doivent à la fois donner une conclusion satisfaisante à tous ces personnages, mais aussi raconter une dernière histoire convaincante avec la même exigence que les années précédentes.

L’enquête débute alors qu’un jeune migrant marocain est retrouvé mort dans une laverie du 18ème arrondissement à Paris. Après les évènements de la saison 7, la 2ème DPJ est « tricarde », autrement dit dessaisie de toutes les affaires d’importance passant par le commissariat. Le groupe s’investit dans cette enquête qui va les aider à remonter la pente après l’incarcération de Gilou. La série va d’ailleurs mettre en scène deux intrigues : l’enquête et le quotidien du policier désormais incarcéré, deux lignes narratives qui ne tarderont pas à s’entrecroiser.

Engrenages reste fidèle à elle même, traitant son sujet avec un réalisme saisissant. Par le sujet de cette saison tout d’abord : le sort des migrants marocains livrés à eux-mêmes, qui s’adonnent au vol à l’arraché et au recel, vulnérables et donc manipulés par le grand banditisme local. Cette histoire de meurtre fait écho aux faits divers qui ternissent le nord-est parisien, gangréné par la crise du crack et la délinquance d’une population parfois très jeune. Dans ce contexte, le groupe mené par Laure, pourtant bien rodé, va peu à peu faire face à tous les rouages d’un système fait d’individualités : d’autres policiers, des magistrats, avocats et agents du service public qui, par carriérisme ou conscience éthique, vont chacun vouloir tirer la couverture de leur côté.

Cette dimension l’a toujours rapprochée de la série mère du genre, The Wire, qui articulait de manière opératique tous les niveaux de ce système, de la rue au bureau du maire. Engrenages ne déçoit pas à ce niveau, confrontant la 2ème DPJ à des considérations politiques, en devant par exemple mettre en danger leur enquête pour satisfaire un préfet soucieux de rassurer les associations de commerçants locaux du 18ème. Une telle tension pousserait n’importe qui au résignement, écrasé par une bureaucratie qui peut aller à l’encontre de la fibre policière. Mais il en faudra plus pour décourager le groupe, qui sera déterminé à élucider une affaire aussi sensible que le meurtre d’un enfant.

Par sa densité, cette saison 8 d’Engrenages nous tient en haleine tout au long de son récit. En jonglant entre des thématiques sociétales et intimes, elle arrive à garder un équilibre qui lui confère un rythme haletant. Si on aimerait qu’elle tente plus de choses dans sa mise en scène, elle arrive à convaincre par l’immersion qu’elle propose dans les différentes strates de l’appareil judiciaire quand il est face à une affaire humainement très délicate. Cette dernière enquête va cristalliser toutes les tensions et les ressentis entre ces personnages, mais aussi entre les personnages et le système dans lequel ils évoluent. Par notre attachement à eux, elle évite un côté trop mécanique et procédural, nous proposant ainsi une conclusion à la hauteur des enjeux qui place l’humain au centre de ses considérations scénaristiques. Bien loin d’un simple engrenage, donc.

La saison 8 d’Engrenages est diffusée sur Canal+ à partir du 7 septembre 2020 à 21h00 (2 épisodes par soir) et disponible en intégralité sur myCANAL.

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Published by
Hugo Clery